Juin 2013
Yéti vient de finir une super manche de freestyle. Malgré la pluie et la boue, elle a su rester motivée. Je la fais sauter dans mes bras et je la serre fort : “Bravo, ma Youyou !!”. Elle va être championne de France de disc dog freestyle pour la deuxième année consécutive (même si, cette fois, c’est non officiel) ! La juge, une américaine renommée, est encore morte de rire après notre performance, elle me fait bravo en levant son pouce. Nous voilà sélectionnées aux championnats du monde ! Seul petit chien de la compétition, seule française sélectionnée pour la finale de freestyle aux Etats-Unis. Je suis tellement fière de toi, ma Yéti ! On s’entend tellement bien, toi et moi ! Tu me connais par coeur, je te connais pas mal. Quand je pense à toi, à ce qu’on fait ensemble, à ton regard, parfois espiègle, parfois si doux, j’en ai les larmes aux yeux ! 4 ans déjà qu’on est ensemble…
Flashback
Juin 2009
Leslie : “J’ai une petite chienne en famille d’accueil en ce moment. Je pourrais te la montrer ? Elle est mignonne, mais elle n’est pas facile, on dirait qu’elle ne sait rien faire sans mettre les dents. On a du mal à la faire adopter, du coup. Tu peux me dire ce que tu en penses ?”
Moi : “Oui, vas-y, amène-la à l’agility”
Tu t’appelais Tchikky
Samedi, 14h. J’ai un souvenir précis de toi sur ce parking. Je ne m’attendais pas à voir une chienne aussi mignonne. Littéralement fondante ! Minuscule, très maigre, un peu fragile, un peu méfiante.
Commence la séance d’agility. Je te revois collée aux basques de Leslie, lui mordillant allègrement les doigts. Un petit essai sur deux-trois haies et le A. Un bolide ! Et d’une intelligence rare !
Quelques jours ou semaines plus tard, je ne sais plus trop comment ça s’est passé, mais me voilà qui t’emmène en balade dans la forêt, pour “faire un essai”. L’enfer ! Au bout de 100 mètres, tu t’arrêtes obstinément, et me fais bien comprendre que tu ne m’aimes pas, que ta maîtresse, c’est Leslie, et que tu n’as pas l’intention de suivre la première bonne femme venue, éducatrice ou pas éducatrice ! Je reprends ta longe, et retente l’expérience loin dans la forêt. Tu t’arrêtes ; je décide de continuer :
– Non mais ! C’est pas un petit clébard de 5 kg qui va me rouler dans la farine ! Je vais la larguer dans la forêt, elle sera bien obligée de suivre.
Et toi : “Pour qui elle se prend, celle-là ? Qu’elle se taille, oui, je serai bien tranquille toute seule et je pourrai repartir chercher ma vraie maîtresse !”
Moi : “Rah la petite garce ! Elle ne suit pas du tout ! Je vais finir par la paumer alors que c’est même pas ma chienne… Bon, je reviens la chercher… Rrrr !”
Tchikky 1, Yannick 0.
Et c’est comme ça que ça a commencé, entre nous deux. La guerre des nerfs. Un mariage de raison, pas d’amour.
Tu étais vive, petite, intelligente, un potentiel de dingue. Tu correspondais à mes critères, et Pampa commençait à fatiguer en tant que chien de travail…
Tu étais difficile, capricieuse, le cœur au bord des dents, péniblement recasable chez un particulier, et moi j’étais qualifiée pour rééduquer les chiens difficiles, et je voulais un chien de sport.
Tu étais un chien idéal pour moi, j’étais une maîtresse idéale pour toi. Sur le papier.
Mais tu ne m’aimais pas. Et je ne t’aimais pas.
Enfin, je t’aimais bien, bien sûr. Mais je ne t’AIMAIS pas.
Je ne voulais pas de deuxième chien. Je n’étais pas prête. Et toi, tu ne voulais pas changer de maîtresse, encore une fois (car chez Leslie, c’était déjà ton 3 ou 4e foyer)…
Bref, tu t’es retrouvée chez moi. Tu m’as mené la vie dure, je ne t’ai pas fait de cadeau non plus.
Après une semaine idyllique, voilà ta vraie nature qui ressort : pipis partout, aboiements, morsures… Tu ne m’as rien épargné. En éducation, en revanche, tu étais parfaite : tu as appris le couché, la marche en laisse et le rappel en un temps record. Ca me changeait de Pampa ! Je t’ai appelée Yéti. Ca reflétait bien ta personnalité de l’époque (Leslie, elle, t’avait surnommée Terminator) ! Une boule de poil adorable à l’extérieur, un mangeur d’hommes à l’intérieur ! Tu as pourri la vie de Pampa. Et ça, j’ai mis longtemps à te le pardonner. Il ne fallait pas toucher à ma Jojo ! Pampa, elle, ne t’a jamais pardonnée…
Un jour, je t’emmène te faire stériliser. Quand je te récupère chez le véto, tu es toute endormie, encore sous l’effet de l’anesthésie. Tu te blottis dans mes bras. Et là, pour la première fois, mon cœur fond. Je suis attendrie par ce petit chien faible et fragile, qui s’abandonne dans mes bras, et je me dis qu’un jour, peut-être, tu briseras ta carapace, et tu ressembleras à ça. Terminator se transformera en Popple.
Pour ceux qui ont moins de 28 ans et plus de 40 ans, les popple, c’est ça ! La peluche transformable en petite boule que j’ai toujours rêvé d’avoir étant petite, mais je ne n’ai jamais eue ! Sauf le mini-popple que j’ai eu la chance de trouver pendant une balade avec ma ponette Pépite sur la balade des Trouvailles (spécial dédicace à ma sœur !)
Pendant 6 mois, c’était “je t’aime, moi non plus”. Tu étais vive et joueuse, agréable à éduquer, malgré ton sale carafon, mais tu planquais bien tes sentiments. Rien ne filtrait. Ça, tu savais te faire cajoler quand tu le voulais, mais ce n’était pas un véritable attachement. J’étais ta machine à papouilles, point. Je te gardais par devoir et par pitié, je t’éduquais par intérêt. C’est dur, mais c’est la vérité.
Cette vidéo de notre fameuse première balade en est un parfait exemple. Ton premier cours de rappel. Obéissante, parce qu’intelligente. Tu as appris à te blottir, parce que les humains trouvent ça mignon, mais le cœur n’y est pas et le regard est triste…
http://youtu.be/ozsbTafeDNY
Et puis, je ne sais pas laquelle des deux a commencé à aimer l’autre… Je pense que c’est toi qui as cédé en premier. Tu t’es attachée à moi, tu t’es adoucie, tu m’as dévoilé ta sensibilité. Je me souviens du jour où tu as compris que tu n’étais pas toujours obligée d’être droite, fière et figée. Et tu as remué la queue, souple et décomplexée. Ca a bien mis un an…
Et nous voilà aujourd’hui, Pampa la douce, Yéti la fière, et moi. Un trio de choc ! Mes deux poulettes, si différentes l’une de l’autre, tellement complémentaires. Vous m’avez appris que l’amour pour un chien peut prendre plusieurs visages. Un coup de foudre pour Pampa, un attachement construit au fil des mois pour Yéti. Et au final, la même tendresse et une reconnaissance immense pour vous deux.
Cet article est dédié à tous ceux qui ont un départ difficile avec leur chien. On ne choisit pas sa famille, on ne choisit pas toujours son chien… Ou on ne le choisit pas bien. Ou pas pour les bonnes raisons. Mais la vie commune, et surtout les activités que l’on partage, nous aident à mieux nous connaître, à nous comprendre, à nous apprécier, et peut-être un jour, à sincèrement nous aimer… Alors accrochez-vous, car votre terreur d’aujourd’hui est peut-être votre grand amour de demain !