[update 2020] J’ai depuis cet article fait beaucoup de recherches et suivi des formations sur le medical training. Pour en savoir plus sur le medical training et découvrir toutes les astuces, rdv sur la plateforme CanissimoEnLigne. Aujourd’hui, Yéti est un bonheur à soigner, aussi bien chez moi que chez le vétérinaire !
Ces derniers temps, Yéti n’a pas été gâtée point de vue santé. En un an, elle a accumulé une opération à la patte pour enlever une boule, une opération pour lui enlever un rein, deux échographies, 7 ou 8 prises de sang, deux scanners, un prélèvement de liquide céphalo-rachidien, une dizaine de jours d’hospitalisation… Bref… La pauvre, qui n’était pas fan des véto, mais restait relativement tolérante, a fini par vriller et devenir particulièrement irascible sur une table de vétérinaire.
Jusque là, je m’étais contentée de limiter les dégâts en anticipant ce que je pouvais par un entraînement en amont.
Voici par exemple une vidéo où je tonds Pampa à l’avance, car je sais qu’elle va avoir une échographie et je veux lui éviter un stress inutile. (https://www.youtube.com/watch?v=d6Hm_K3vw-g)
Mais après tous ses soucis, une simple anticipation ne suffisait plus (elle entrait en panique totale pour une prise de sang), j’ai dû passer à l’étape d’après.
Encouragée et remotivée par le docteur en psychologie humaine et animale Susan Friedman, j’ai établi un vrai programme en deux phases : une chez moi, et une chez ma vétérinaire, adorable, qui a accepté de jouer le jeu. On est loin d’avoir fini notre chemin, mais je vous fais quand même part des avancées.
Voici le travail que l’on peut faire chez soi
Habituation aux soins à la maison
– Créer des associations positives avec les soins, comme on devrait le faire avec tout chiot. Je te regarde les oreilles, tu as un bonbon. Je te touche les pattes, tu as un bonbon. Puis on va petit à petit plus loin dans les soins réels ou factices. On travaille avec les textures (je t’applique un coton mouillé sur la patte, tu gagnes un bonbon…) et les matériaux (je te touche les flancs avec un trombone – simulant une aiguille- tu gagnes un bonbon). Etc.
Il est important de faire tout ça sous forme ludique, et de ne pas “viser” seulement les zones qui seront soignées (on peut faire le coup de l’aiguille partout sur le corps, pas seulement à l’endroit du vaccin ou de la prise de sang)
L’important est bien sûr d’y aller très progressivement, et même de récompenser la simple vue d’une seringue si on pense que le chien n’est pas encore prêt pour un contact physique.
– Laisser le chien acteur de ses soins. Au lieu de lui prendre la patte de force, on va lui apprendre à nous la donner volontairement. Et s’il a peur de la donner, on récompense le moindre petit mouvement de patte dans le bon sens, jusqu’à ce qu’il se décontracte (si vous connaissez l’usage du clicker, c’est encore mieux)
J’ai aussi appris à Yéti à poser sa tête au creux de ma main, pour lui regarder les yeux, le nez ou les dents, par exemple.
Voici une vidéo où Yéti apprend à tolérer sa collerette (https://www.youtube.com/watch?v=7-j8hr3q-D8).
– Information capitale : pour associer les soins à la récompense, et pas la récompense aux soins (c’est-à-dire pour que le chien se dise “chouette, on me soigne, je vais avoir une saucisse”, et pas, au contraire, qu’il se dise à la vue d’une saucisse “Au secours ! Je vais me faire soigner”), il est primordial que le soin arrive avant la récompense, et non pas le contraire. Pour faire simple, le chien associe avec le dernier élément : si on fait “je soigne, puis je récompense”, il restera sur la récompense. Si on fait “je donne un bonbon, puis je soigne”, il restera sur le soin et cela détruira l’impact de la “récompense”.
Ce travail à la maison est essentiel, car il crée un historique de récompenses associées aux soins, et il permet au chien de savoir ce qui l’attend. Mais attention, ça ne sera jamais suffisant pour vraiment désensibiliser au vétérinaire, car une fois dans le cabinet du véto, le chien reconnaîtra le contexte et la peur reviendra.
Il est donc important d’arriver à convaincre son vétérinaire de nous aider pour la deuxième phase :
Désensibilisation (ou habituation) chez le véto.
Ma gentille véto a accepté que l’on fasse 6 séances dans son cabinet en 3 semaines. Les séances duraient de 30 secondes pour les premières à 5 minutes pour les dernières. Entre chaque séance, je retravaillais à la maison ce qu’on avait fait chez le véto. Après chaque séance, je prenais des notes sur les exercices faits et l’état psychologique de Yéti.
- Séance 1 : dans le cabinet vétérinaire, Yéti par terre (pas sur la table) je refais moi-même les apprentissages faits à la maison (patte, tête dans la main) et je récompense moi-même (elle prend la récompense du bout des lèvres). Yéti est complètement prostrée. Elle a du mal à donner la patte. Je récompense l’effort et la laisse retirer sa patte rapidement. En fin de chaque séance, elle gagne un jackpot avec tout un pot de nourriture (pâtée pour chien, viande, etc) sur la table du véto, sans manipulation.
- Séance 2 : la véto demande de donner la patte et la tête et je récompense (Yéti n’accepte pas encore la récompense venant de la véto). Légère osculation de la véto (elle écoute son cœur) + récompense
- Séance 3 : on refait les mêmes exercices, osculation plus poussée (elle regarde les dents, les yeux). La véto récompense (Yéti accepte, cette fois-ci). On ajoute un coton imbibé d’eau sur la patte pour simuler le début prise de sang. Yéti donne sa patte avec hésitation et la retire au contact du coton. On la laisse retirer sa patte et on recommence. Au bout du 3e essai elle donne franchement sa patte.
- Séance 4 : on reprend les exercices + je demande des positions “utiles” sur la table (couché, dodo sur le côté) et aussi des positions ludiques associées à un historique positif (fais la belle etc). Ca coince encore un peu. Je récompense les efforts malgré tout. On remplace le coton mouillé par un coton imbibé d’alcool. Ca passe. On simule un vaccin de toux de chenil en touchant sa truffe avec une seringue (sans aiguille). Elle retire sa tête. On la laisse faire, puis on récompense les efforts. On simule la pose d’un garrot à la patte, sans serrer.
- Séance 5 : les positions et l’osculation passent bien maintenant. La “seringue dans le nez” aussi. On serre le garrot, Yéti se laisse faire, alors que c’est ce qui l’avait fait partir en panique à la dernière vraie visite (méga récompense). On ajoute la prise de température rectale. Yéti se s’assoit, mais pas de réaction exacerbée. Jackpot et jeu.
- Séance 6 : Yéti est à l’aise, maintenant. Toujours plus stressée qu’à la maison, bien sûr, mais elle cherche la nourriture et accepte volontiers de jouer. Après plusieurs simulations récompensées, on fait une vraie injection de serum physiologique. Yéti se laisse bien piquer, mais au moment de l’injection, elle réagit en se retournant vivement (sans mordre). Semi-échec, car on lui a crée du stress… C’était sans doute un peu tôt… On a récompensé vivement les efforts par un gros jackpot et recommencé une simulation de piqûre (sans piquer) qui est bien passée.
Pour ne pas trop accaparer le temps de ma vétérinaire, j’ai été obligée de faire un planning assez serré et rapide, mais il s’est quand même avéré efficace. Si Yéti n’a pas d’autres problèmes d’urgence, on recommencera des “fausses visites” 15 jours avant la date de ses vaccins ou prochaines prises de sang programmées, histoire de recréer un peu de positif sans que mon stress entre en jeu (malgré nos efforts, on est toujours plus stressé quand on sait qu’on va réaliser de “vrais soins” et qu’on appréhende la réaction de son chien).
Pour tous ceux qui pensent que c’est une fatalité, prenez courage et demandez à votre vétérinaire de vous aider. S’il refuse, peut-être en trouverez-vous un autre intéressé par la démarche. Parlez-lui du travail qui se fait en zoo pour soigner des animaux d’une tonne, des nouvelles recherches en la matière… Le “medical training”, c’est l’avenir des soins vétérinaires ! Si vous n’arrivez pas totalement à désensibiliser votre animal, soyez convaincu que tous ces efforts n’ont pas été vains, et qu’il permettent quand même de renforcer l’historique positif de votre chien chez le vétérinaire.
Et souvenez-vous, comme le dit le Dr Friedman, que votre chien est fort, qu’il a en lui a résilience pour faire face à tout ça, surtout s’il a un maître attentionné et concerné. “I have 100% confidence he can learn to predict the vet environment and remain resilient to small discomforts, just like the rest of us”
Merci infiniment à elle de m’avoir donné la force de croire en la force de ma chienne…