Un article assez court, aujourd’hui. Ici, je parle de frisbee, parce que c’est particulièrement notoire, mais je pense que le concept est transposable dans plein de disciplines sportives canines.
Une des plus grosses difficultés que je rencontre en cours de frisbee, ça n’est pas d’apprendre aux chiens à attraper, ni à se contrôler, ni à sauter. Ca n’est pas d’apprendre aux gens à lancer, ni à se synchroniser. C’est d’apprendre aux gens à bien s’aimer. A être indulgents, bienveillants, compréhensifs envers eux-mêmes.
La phrase que vous entendrez le plus souvent dans la bouche d’un débutant ? « Mon chien est très bien. C’est moi qui suis nul. » Je ne peux vous dire combien de fois par semaine j’entends ou je lis cette phrase.
Alors sachez que oui, quand on débute le frisbee, souvent, on ne sait pas lancer. C’est le principe de débuter quelque chose, en fait. Si on débute, c’est qu’on ne sait pas encore faire.
Alors bien sûr, dans d’autres sports canins, on rencontre un peu moins la difficulté, car si beaucoup de gens ont du mal à se synchroniser, la plupart savent quand même marcher, courir, lever les bras, parler… L’agility, les hoopers, l’obé rythmée, l’obéissance, le treibball, font appel à des capacités que l’on a déjà un peu, et que l’on doit affiner. Le frisbee fait appel à une capacité qu’on ne travaille pas depuis son plus jeune âge (du moins en France, à l’heure actuelle, même si ça va venir) : manier et lancer tout un tas de bouts de plastique ronds.
L’autre paramètre est qu’en frisbee, si on lance mal, la sanction est immédiate et saute aux yeux. Le chien n’attrape pas, il peut se lasser ou se faire mal. La frustration est très vite là, et pour le chien, et pour le maître.
C’est pourquoi j’essaye de vous faire avancer à tout petits pas, pour aller de réussite en réussite. Mais comme ça n’est pas toujours possible, oui, l’échec est parfois là. Alors oui, il faut savoir gérer l’échec. Ne pas monter en pression, prendre du recul, lâcher prise. Le frisbee est une excellente école pour les ultra perfectionnistes et les gens qui manquent de confiance en eux !
J’ai quatre mots clés à donner aux gens qui se trouvent nuls (attention, je sais de quoi je parle, j’ai longtemps fait partie de cette catégorie de gens, et encore aujourd’hui, parfois, je dois me raisonner), pour leur apporter le PLUS qui manque peut-être à leur équipe :
Partenaire
Lancer
(h)Umanité
Succès
- Partenaire : Le frisbee est un sport d’équipe. Pensez à votre partenaire, votre chien. Votre chien s’amuse, et il aime s’amuser avec vous. Il n’a pas idée de ce qu’est pour vous un joli lancer ou un lancer pourri. Certes, ça peut-être frustrant pour lui d’aller toujours récupérer un frisbee tombé au sol, mais qu’est-ce qui est le plus frustrant : ça, ou voir son maître se lamenter et râler à chaque lancer ? Qu’est-ce qui est le plus démotivant : ne pas arriver à attraper un frisbee lancé trop tôt ou trop tard, ou voir son partenaire se décomposer et en oublier totalement l’interaction ? Alors n’oubliez pas votre partenaire, et si ce n’est pour vous, au moins pour lui, restez joyeux et positifs, même en cas d’échec. Parce que votre chien, lui, frisbee attrapé ou pas, il voudrait s’amuser !
- Lancer : Entraînez-vous à lancer sans votre chien, et ne mettez le chien dans la « boucle » que quand vous semblez plus à l’aise. La culpabilité envers son chien fait beaucoup dans l’auto-flagellation du discdogger débutant. Alors enlevez cette partie de l’équation, faites plus simple avec votre chien (il attrape le frisbee dans la main, ou le frisbee qui glisse ou roule par terre, travaillez la base avec un jouet ou une friandise), et lancez seulement quand vous êtes sûrs de pouvoir supporter une erreur de votre part. C’est-à-dire quand vous avez eu suffisamment de réussites seul pour pouvoir encaisser l’échec, ou quand vous êtes de suffisamment bonne humeur pour ne pas vous auto-plomber.
- (h)Umanité. Faites preuve d’humanité envers vous-mêmes. Prenez du recul, et parlez-vous comme à un ami. Avec lucidité, mais bienveillance. Pas la peine de vous prendre pour superman et de vous jeter des fleurs si vous lancez quiche sur quiche, mais regardez les faits de manière posée et objective. Oui, vous avez raté des lancers. Oui, vous avez du mal à vous coordonner. Est-ce que ça fait de vous un nul, ou simplement un débutant ? Est-ce que cet état est irrémédiable ou n’est-ce qu’un passage obligé ? Est-ce que vous diriez à votre fils, qui apprend à lire, qu’il est nul, parce qu’il ânnone son texte ? Diriez-vous à votre fiancée, qui apprend à faire du ski, qu’elle est nulle parce qu’elle n’ose pas aller sur une piste rouge ? Non ! Ils apprennent, c’est tout. Quand on apprend, on passe par un état transitoire de « performance non optimale »
- Succès. Voyez chaque petite réussite, et non chaque échec. Il y a forcément des moments où ça passe, où le lancer est allé au bon endroit, est parti un peu mieux que d’habitude. (Par un hasard total, me direz-vous, toujours très optimiste !) Moi je dis que si ça marche une fois, ça peut marcher encore une fois, et encore une fois, et de plus en plus souvent.
- (et numéro 5 en bonus : arrêtez de vous comparer aux champions du monde sur Youtube. Eux aussi ont été débutants et désespérés un jour, on ne voie juste pas leur vidéo de l’époque)
Alors juste pour vos yeux, voici la première vidéo de frisbee de Yéti et moi, en 2010 à Animalin. Et je suis sûre qu’aucun d’entre vous, en la voyant, ne nous trouvera “nulles”. Juste débutantes. Et pourtant, on s’amuse bien !
Alors voilà, pour votre bien, pour le bien de votre chien, (pour le bien de votre entraîneur, aussi, ou de votre famille qui vous soutient), soyez bienveillants envers vous-même comme vous l’êtes envers votre chien. Vous n’en serez qu’un meilleur maître et un meilleur partenaire. Aime-toi, ton chien t’aimera !